La Réserve : Archives Cécile Lignereux
La condamnation des « fautes qui peuvent avoir de mauvaises suites » dans le Traité sur la manière d’écrire des lettres de Grimarest
Initialement paru dans : P. Chiron et Ch. Guérin (dir.), L’Infraction stylistique et ses usages théoriques de l’Antiquité à nos jours, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Rivages linguistiques », 2016, p. 105-122.
Texte intégral
1Affichant l’ambition d’enseigner les normes d’expression propres à réguler harmonieusement les échanges épistolaires, les secrétaires de l’âge classique ne se contentent pas d’édicter des préceptes (illustrés ou non de modèles de lettres) concernant l’élégance et la politesse du style. Aux règles à suivre (qu’elles soient générales, lorsqu’elles figurent dans des propos introductifs visant à rappeler les spécificités de la conversation entre absents, ou qu’elles soient particulières, lorsqu’elles s’insèrent dans les descriptifs fixant les propriétés définitoires de chaque sorte de lettres), les manuels épistolographiques joignent de fermes mises en garde contre les principaux écueils à éviter, à tel point que la description des infractions stylistiques constitue l’un des procédés caractéristiques de l’outillage didactique déployé par ces ouvrages si représentatifs du processus de civilisation des moeurs. Si les auteurs des manuels d’art épistolaire consignent à l’envi les incivilités et les indécences dont il convient de se prémunir, sous peine d’entraîner de fâcheuses conséquences relationnelles (les préoccupations stylistiques des secrétaires s’avérant indissociables des objectifs pragmatiques propres aux usages effectifs de la sociabilité mondaine), ce n’est pas seulement parce qu’ils prennent un malin plaisir à détailler les ridicules, à épingler les impertinences ou à se moquer des incongruités préjudiciables à une sociabilité sereine et apaisée. C’est parce qu’à l’instar des auteurs de traités de savoir-vivre contemporains, ils prennent toute la mesure de la dimension formatrice de la condamnation des vices de style les plus couramment observés dans les pratiques épistolaires du temps.
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1 Jean-Léonor Le Gallois, sieur de Grimarest, « professeur de langues à Paris...
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2 L’édition du Traité sur la manière d’écrire des lettres et sur le cérémonia...
2Assurément, la dénonciation des infractions stylistiques poursuit un but pratique, adapté aux besoins concrets des échanges mondains : il s’agit d’aider l’usager du manuel à parfaire son style épistolaire. Averti des maladresses les plus tentantes, il devient capable d’identifier ses propres travers et de veiller à s’en défaire. Pourtant, même si la description des défauts d’expression est motivée en priorité par cet objectif fonctionnel, ses bénéfices pédagogiques ne s’épuisent pas dans l’acquisition d’un savoir-faire, entendu comme une technique de production épistolaire pleinement adaptée aux codes sociodiscursifs de la civilité. Dans la mesure où le geste même qui consiste à repérer, à évaluer et à condamner des transgressions invite le lecteur à s’interroger sur les normes qui les sous-tendent, la condamnation des vices de style façonne également le lecteur en instance de jugement critique. Pour le dire autrement, les apports, pour l’usager du manuel, de la reprise méticuleuse des principaux défauts du style épistolaire ne sont pas seulement d’ordre pratique (la maîtrise de son comportement épistolaire, en plein connaissance de ses difficultés) mais également d’ordre spéculatif (l’enrichissement de sa compétence critique). Que la dénonciation des infractions stylistiques susceptibles de nuire à la qualité de la rédaction épistolaire ne vise pas seulement à proposer aux lecteurs des recettes garantissant le succès de la communication épistolaire, mais qu’elle contribue à leur formation critique en prenant position sur la plupart des débats théoriques dont la vitalité persistante au fil des décennies (non sans ajustements et déplacements d’enjeux) est largement entretenue par l’intérêt qu’y prennent les cercles mondains, c’est ce que prouve de manière exemplaire le Traité sur la manière d’écrire des lettres de Grimarest (1659-1713)1 – et plus précisément le développement d’une quinzaine de pages, intitulé « Du stile épistolaire » qui, s’il ne se présente ni explicitement ni continûment comme une liste de proscriptions, n’en passe pas moins en revue toute une série de négligences, de fautes de goût et d’erreurs d’appréciation responsables des principaux défauts de l’élocution épistolaire2.
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3 Parmi les exposés systématiques des vertus stylistiques à respecter en tout...
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4 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 8.
3Alors que de nombreux auteurs de secrétaires débutent leur ouvrage en rappelant brièvement, sur un mode aussi convenu que scolaire, les qualités du discours indispensables à toute lettre (dans le sillage de la tradition rhétorique des virtutes dicendi)3, Grimarest choisit d’examiner en une dizaine de paragraphes différentes « fautes qui peuvent avoir de mauvaises suites4 ». Le propos se présente comme une succession de remarques éclectiques, conformément aux options d’une critique mondaine préférant juxtaposer sans transition les réflexions les plus diverses plutôt que de donner prise aux accusations de formalisme pédant. Ne nous méprenons pas cependant : si Grimarest renonce à l’exposé synthétique de règles d’expression au profit d’un catalogue de façons de s’exprimer présentées comme autant de contre-modèles, ce n’est pas seulement dans le but de se démarquer de formes assimilées, en ce début du XVIIIe siècle, à d’importunes démonstrations dogmatiques. C’est aussi et surtout, comme voudrait me montrer cette étude, parce qu’il mesure pleinement l’efficacité pédagogique d’une méthode qui, prenant le contre-pied d’une activité prescriptive procédant de préoccupations théoriques, repose sur deux principes : d’une part, éviter l’abstraction des catégories critiques au profit de l’examen de procédés concrets et d’autre part, substituer au dogmatisme esthétique l’observation empirique de phénomènes pragmatiques.
Éviter l’abstraction des catégories critiques au profit de l’examen de procédés concrets
4En choisissant de dénoncer tel ou tel fait de style plutôt que de définir les propriétés du bel usage épistolaire, comme tant de ses prédécesseurs, Grimarest fait preuve d’un indéniable bon sens pédagogique. Autant les infractions stylistiques stigmatisées frappent volontiers le lecteur, qui, invité à prendre conscience de leur inélégance, se trouve immédiatement convaincu de la nécessité de respecter des normes précisément édifiées contre les défauts d’expression qui menacent le succès de sa lettre ; autant les consignes théoriques, formulées à grand renfort d’ambitieuses réflexions sur des catégories critiques aussi intuitivement consensuelles que floues quant aux procédés susceptibles de les mettre en pratique, n’ont pratiquement aucune chance de porter leurs fruits. Renonçant à formuler une accumulation indigeste de principes et de règles, Grimarest décide d’inventorier toute une série de phénomènes jugés incompatibles avec les normes usuelles du bien-dire épistolaire, d’ailleurs dûment rappelées dans la première phrase du développement qui nous occupe : « L’expression dans les Lettres doit être vive, naturelle, nette & concise, sans qu’il y paraisse de travail ». Alors qu’une telle entrée en matière laisse présager la reconduction d’une activité prescriptive fondée sur la description systématique et exhaustive d’idéaux stylistiques (vivacité, naturel, netteté et brièveté, aisance ou facilité), Grimarest, défiant à l’égard de l’abstraction théorique, consacre toute la suite de son propos à l’inventaire des principales entorses à ces idéaux. À l’opposé aussi bien d’une collecte purement aléatoire que d’une classification méthodique, à l’opposé, en outre, aussi bien d’une liste de faits langagiers relevant de préoccupations hétérogènes (esthétiques, techniques, morales, sociales) que d’une recension visant la cohérence doctrinale, les phénomènes consignés constituent autant d’exemples concrets d’infractions aux idéaux stylistiques précédemment mentionnés. Autrement dit, il est possible de regrouper les phénomènes linguistiques analysés en fonction des normes qu’ils enfreignent, notamment celles du naturel et de la brièveté.
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5 Pour une synthèse sur l’exigence sans cesse croissante de naturel dans la p...
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6 Pour un tour d’horizon des termes utilisés par la critique pour dénoncer le...
5À une époque où le naturel se situe sans conteste au sommet de la hiérarchie des valeurs stylistiques en général, et où il constitue l’idéal hégémonique de l’écriture épistolaire en particulier5 (l’affiliation de la lettre à la conversation honnête étant admise de longue date, et scrupuleusement rappelée en tête de tous les secrétaires), on ne saurait s’étonner de voir s’ouvrir le développement intitulé « Du stile épistolaire » sur la proscription de procédés perçus et rejetés comme des infractions à cette valeur dominante. Délaissant aussi bien le vocabulaire de spécialité de la description des styles que les vastes enjeux théoriques très prisés des écrits critiques du siècle précédent, Grimarest met en garde, de manière laconique, contre deux types de faits d’expression jugés intolérables tant, au terme de nombreuses décennies de réflexions structurées autour de paradigmes antithétiques dont nul n’est besoin de rappeler l’importance dans le discours critique du Grand Siècle, ils sont perçus comme situés aux antipodes d’un bon goût épistolaire désormais identifié à la simplicité (vs recherche), à la facilité (vs affectation), et à l’aisance (vs contrainte) constitutives d’un style naturel6 : ceux qui relèvent de la rhétorique et ceux qui incarnent le badinage – deux modes langagières définitivement passées de mode :
7 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 17-18.
L’Expression dans les Lettres doit être vive, naturelle, nette & concise, sans qu’il y paroisse de travail. Car elles sont affreuses lorsqu’elles sont embarrassées de sentences, d’exemples, de raisonnemens étudiés, & de tous les lieux communs renfermés dans la Rhétorique. […]
Les pointes, les jeux de mots sont aujourd’hui bannis du bel usage dans le stile épistolaire. Le merveilleux n’y déplaît pas moins ; c’est sortir de la nature d’emploïer de grands mots, qui le plus souvent ne signifient rien ; & se donner un fort petit mérite que de badiner sur les termes.7
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8 Les secrétaires se contentent rarement de faire état des critères de goût e...
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9 Pour une mise en perspective du rejet progressif d’une rhétorique de plus e...
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10 Nous reprenons ici les termes qu’emploie le chevalier de Méré critiquant l...
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11 C’est à ces deux épistoliers que Ch. Sorel consacre l’essentiel de la part...
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12 Sur la manière dont Costar cherche « à accréditer dans le public l’image d...
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13 Comme le souligne G. Haroche-Bouzinac, « dans cette désaffection progressi...
6Sans entrer dans le détail des querelles et des controverses qui constituèrent autant d’étapes décisives dans leur progressif et irrémédiable discrédit, contentons-nous d’expliciter les présupposés et les références sur lesquels s’appuie Grimarest pour inciter ses lecteurs à tenir compte, lorsqu’ils rédigent une lettre, des mutations du goût et de la sensibilité épistolaires8. La condamnation des lettres empreintes de rhétorique et de celles relevant du badinage galant est d’autant plus efficace qu’elle sollicite implicitement les catégories esthétiques négatives qui, à force d’être alléguées depuis un demi-siècle autant par les remarqueurs que par les auteurs d’ouvrages de savoir-vivre, autant par les critiques que par les gens du monde, imprègnent l’imaginaire collectif. D’une part, en s’en prenant aux « sentences », aux « exemples », aux « raisonnemens étudiés » et aux « lieux commun » caractéristiques d’une « Rhétorique » devenue l’archétype d’une prose laborieuse, factice et technique, Grimarest réactive dans l’esprit de son lecteur les griefs les plus fréquemment formulés à l’encontre d’une prose guindée, qui sent l’art et le travail, prompte à dégénérer en style enflé et bouffi – tout un métalangage aux connotations péjoratives ouvertement polémiques servant à pointer les risques inhérents à un usage excessif des artifices rhétoriques9. D’autre part, lorsque Grimarest affirme que « sont aujourd’hui bannis du bel usage dans le stile épistolaires » les « pointes », les « jeux de mots », le « merveilleux » ou « les grands mots », il mobilise, certes avec discrétion, les repoussoirs utilisés par les détracteurs du badinage galant – celui-ci se trouvant régulièrement accusé d’accumuler par affectation les faux-brillants, de raffiner vainement et de faire preuve d’une subtilité excessive10. Il est d’ailleurs piquant de constater qu’en prenant pour cible à la fois les procédés qui symbolisent une éloquence nourrie de rhétorique et ceux qui illustrent l’art du badinage (tous deux attaqués pour leur artificialité, à une époque où est achevé le vaste mouvement de simplification du style épistolaire qui traverse tout le XVIIe siècle), Grimarest intente le même procès aux deux figures concurrentes qui furent jadis successivement érigées au rang de modèles en matière de style épistolaire, à savoir Guez de Balzac et Voiture11. Quand on sait que c’est parce qu’il fut perçu comme plus naturel que celui de Balzac que le style de Voiture l’emporta (certes au prix d’injustes simplifications qui présentent cependant l’avantage de révéler de nouvelles attentes stylistiques12), on mesure à quel point, pour être constamment revendiqué comme qualité principale du style épistolaire, le naturel n’en demeure pas moins une notion éminemment labile, dont les critères d’appréciation sont en constant renouvellement, un style naguère vanté pour son naturel étant présenté un demi-siècle plus tard comme l’exemple à fuir absolument, tant ses ingénieux procédés sont désormais perçus comme excessivement recherchés13. Dans ces conditions, on comprend aisément que si Grimarest entend bien mettre en garde les usagers de son traité contre deux types de tendances stylistiques frappées d’obsolescence, il n’en cherche pas moins à se préserver de l’abstraction théorique, les catégories en jeu s’avérant trop fuyantes et trop relatives pour servir utilement son dessein pédagogique.
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14 Parmi les secrétaires défendant la médiocrité en matière de longueur des m...
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15 L’articulation de la réponse avec le propos antérieur constituant un passa...
7Instruire par des contre-exemples concrets et non par des spéculations autour de l’axiologie stylistique qui préside à leur proscription : telle est la méthode que reconduit Grimarest à propos des deux phénomènes qu’il dénonce (plus ou moins explicitement) comme contraires à la brièveté – qualité primordiale du style épistolaire s’il en est, systématiquement rappelée par les manuels. Là encore, si Grimarest se contente de disqualifier deux procédés précis, c’est qu’il pressent, à juste titre, que les recommandations valorisant la « médiocre grandeur14 » ne sauraient guère aider les usagers du traité à calibrer au mieux leurs missives. Le premier procédé à être dénoncé comme rendant « le stile plat et aride » dans la mesure où il repose sur la « répétition » des « termes » utilisés dans la lettre antérieure, concerne les formules utilisées au moment de répondre à son correspondant sur quelques points précis15 :
16 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 27-28.
Il en est de même [ils dégoûtent infailliblement le lecteur] de ceux qui dans leurs réponses répetent avec les mêmes termes, ce qu’on leur a mandé, sans l’assaisonner d’un tour nouveau pour en faire supporter la répétition. Vous m’avez mandé, Monsieur, que vous viendriez ici incessamment. J’en ai bien de la joie, &c. est d’un très-mauvais goût. Il faut confondre son sentiment avec la chose sur laquelle on répond. J’ai bien de la joie que vous aïez pris le parti de venir ici incessamment, &c. Quoique cette premiere manière rendre le stile plat et aride, elle est cependant très-ordinaire ; parce que l’on néglige presque toûjours d’arranger si bien ses pensées dans une Lettre, qu’il n’y ait rien de superflu dans le tour que l’on donne à son expression.16
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17 En plaidant pour un agencement des parties libre et spontané, Grimarest ne...
Le second procédé stigmatisé, qui consiste à se servir abusivement des « conjonctions, qui emploïées souvent, rendent le stile lâche & trop grammatical », se rapporte aux transitions entre les différents sujets successivement abordés dans la lettre17 :
18 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 28-29.
Je suis de sentiment que l’on doit disposer ses pensées dans une Lettre, de sorte qu’elles soient plus liées par elles-mêmes, que par le secours des conjonctions, qui, emploïées souvent, rendent le stile lâche & trop grammatical. Mais lorsqu’on ne se sert précisément que des termes absolument nécessaires pour faire entendre la suite des pensées, on conduit agréablement le Lecteur, jusqu’à la fin d’une Lettre, sans qu’il puisse se distraire.18
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19 Une telle défiance à l’encontre des transitions fait écho à l’abandon des ...
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20 Sur l’imaginaire linguistique sous-jacent à ces catégories, voir D. Denis,...
8En incitant l’usager du traité à cultiver souplesse et fluidité dans l’enchaînement des sujets plutôt que d’user de mots de liaison et de locutions stéréotypés, Grimarest se montre à nouveau soucieux d’alerter son lecteur sur la nécessité de tenir compte des critères de goût en vigueur19, la réticence à l’encontre d’articulations logiques artificielles s’enracinant dans la valorisation d’un style doux et coulant, à l’opposé d’un mode d’expression rude et brusque20. Indéniablement, la méthode qui consiste à bannir certains procédés de style précis (en l’occurrence, les formules conventionnelles assurant les reprises diaphoniques constitutives de l’interlocution épistolaire et les connecteurs logiques censés assurer la cohésion de la lettre en liant les différentes matières entre elles) plutôt qu’à délivrer des conseils généraux relatifs à l’idéal unanimement partagé de brièveté est pédagogiquement fructueuse : Grimarest donne à l’usager du traité les moyens concrets de rendre son style plus concis en deux endroits stratégiques de sa lettre. Pariant sur l’efficacité prophylactique d’un dispositif qui consiste à présenter au lecteur des procédés dont la gaucherie pleine de lourdeur se révèle incompatible avec un style où « il n’y ait rien de superflu » et où « on ne se sert précisément que des termes absolument nécessaires », Grimarest n’éprouve pas le besoin de donner plus d’ampleur théorique à son propos.
Substituer au dogmatisme esthétique l’observation empirique de phénomènes pragmatiques
9Quel que soit le type d’infraction dénoncé (qu’il s’agisse des procédés contraires au naturel ou de ceux qui contreviennent à la brièveté), ce n’est qu’en creux, comme nous avons pu le constater, que sont suggérés les idéaux stylistiques qui motivent de telles proscriptions. Attentif à se mettre à l’abri de l’abstraction théorique, Grimarest prend visiblement soin d’occulter les catégories esthétiques qui, organisées en d’édifiantes antithèses, sont omniprésentes dans les écrits critiques du siècle précédent – catégories qu’à la charnière entre le XVIIe et le XVIIIe siècle, le lecteur ne peut manquer de repérer dans le filigrane des phénomènes ostracisés. Loin d’apparaître comme des phénomènes isolés choisis arbitrairement, les fautes de style sélectionnées par Grimarest entrent en effet en résonance avec des couples notionnels dont la fécondité se voit ainsi confirmée. À la question de savoir pourquoi est-ce que Grimarest en rejette l’usage explicite, nous avons déjà apporté des éléments de réponse en soulignant à plusieurs reprises ses préoccupations pédagogiques. En choisissant non pas d’énoncer des règles d’expression au moyen de notions aussi incontournables que floues, mais de procéder à la condamnation de procédés présentés comme défectueux, Grimarest fait preuve d’une redoutable habileté didactique. D’une part, il esquive les développements théoriques susceptibles de rebuter son public, l’emploi d’une terminologie critique inégalement stabilisée appelant des gloses fastidieuses. D’autre part, en soulignant le caractère désagréable et ridicule des infractions mentionnées, il immunise l’usager du manuel contre sa propension manifestement innée à les commettre, l’aidant ainsi à épurer son style. Enfin, comptant sur l’aptitude de son lecteur à identifier les valeurs sous-jacentes à la condamnation des quelques procédés judicieusement choisis pour leur caractère exemplaire, Grimarest confère aux cas particuliers examinés une portée illustrative propre à le faire adhérer encore plus fortement, car désormais en toute conscience de leur intérêt, à des normes d’expression qui, pour être indiscutées, n’en restaient probablement pas moins jusque-là lettre morte.
10À y regarder de plus près encore, si Grimarest récuse systématiquement l’usage des catégories critiques pourtant constitutives de l’axiologie stylistique qui transparaît à travers son propos, c’est également en raison d’un autre parti-pris pédagogique : celui qui consiste à évacuer la dimension esthétique des infractions recensées au profit d’une optique centrée uniquement sur leur rendement pragmatique. À rebours des discussions hautement théoriques menées par les critiques du XVIIe siècle, animés par l’idée d’une perfection non seulement possible mais encore imminente de la langue française, Grimarest cultive pour sa part une approche appréhendant les faits de style non par rapport à des normes établies a priori, mais à travers leur impact au sein de l’interaction épistolaire. De la part d’un pédagogue scrupuleux, le refus délibéré de formuler des jugements d’ordre esthétique est tout à fait compréhensible : il est certain que pour parvenir à convaincre l’usager du traité de la nécessité de renoncer à certains procédés déterminés, mieux vaut lui prouver les risques qu’il encourt (ennuyer son destinataire, passer pour impoli, et en définitive, déplaire à son correspondant) que décrire des principes esthétiques. Examiner toutes sortes de phénomènes, relevés pour eux-mêmes et analysés sans esprit de système, qui mettent en péril les fragiles équilibres interpersonnels plutôt que de viser la cohérence doctrinale d’une esthétique : tel semble être le mot d’ordre de Grimarest. Que les faits de style dénoncés comme des infractions soient évalués non pas à l’aune de postulats idéologiques mais en regard d’impératifs pragmatiques, qu’ils soient passés au crible non pas de concepts normatifs mais d’exigences techniques, qu’ils soient confrontés non pas à des idéaux dogmatiques mais à leurs qualités opérationnelles, c’est ce que montre le traitement par Grimarest de trois défauts d’expression qui ont d’ailleurs déjà fait couler beaucoup d’encre au siècle précédent : la dureté du style, la présence de répétitions et l’emploi de synonymes.
11Si Grimarest juge répréhensible la « dureté » d’un style excessivement corseté par les « principes de la Grammaire », c’est qu’il estime qu’elle enfreint l’exigence, impérieusement requise par l’art de plaire en vigueur à l’orée du XVIIIe siècle, de « vivacité », dont la « concision » apparaît comme la condition nécessaire.
21 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 24-25.
En observant les principes de la Grammaire, on doit éviter sa dureté dans le stile épistolaire, pour lui donner de l’agrément. Les expressions cavalieres & figurées, qui, emploïées à propos & avec ménagement, rendent une Lettre très-agréable, ne sont pas toûjours séverement assujetties aux regles grammaticales. Non que je prétendre ici mettre mon Lecteur en droit de faire des solécismes, ou des barbarismes ; mais quand il s’écartera de cette puerile servitude où quelques Grammairiens veulent nous assujettir pour l’emploi, & pour l’arrangement des termes, je soutiens qu’il ne gâtera point son stile, principalement lorsque ce petit desordre donnera de la vivacité ou de la concision à son ouvrage.21
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22 Sur ces distinctions de Bouhours, voir G. Declercq, « Usage et Bel Usage :...
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23 Après qu’Eugène a souligné que « la langue Française aime fort la naïveté ...
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24 G. Siouffi, Le Génie de la langue française, op. cit., 2ème partie, chap. ...
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25 Sur la puissance d’un courant anti-puriste aussi vivace que protéiforme to...
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26 Sur ces qualités stylistiques unanimement prônées par les secrétaires de l...
Afin de détourner l’usager du manuel d’un purisme jugé dommageable à « l’agrément » de ses lettres, Grimarest reste fidèle à ses principes pédagogiques : plutôt que de formuler des recommandations abstraites quant à la supériorité esthétique d’une négligence opposée à une trop grande exactitude, plutôt que de démontrer qu’il faut parfois préférer le bel usage au bon usage, c’est-à-dire l’élégance à la correction22, plutôt que de se perdre en conjectures sur la naïveté propre au génie de la langue française23, il cite un exemple précis de procédé, à savoir l’usage d’« expressions cavalieres et figurées ». En vantant l’attrait d’un « petit desordre », c’est-à-dire en défendant l’idée qu’il vaut mieux s’exprimer avec une vivacité qui implique de commettre parfois non pas des fautes grossières (les « solécismes » et les « barbarismes ») mais d’attrayantes irrégularités (alors volontiers conçues comme des négligences), que produire un style aussi lourd que scrupuleux, Grimarest illustre d’ailleurs remarquablement l’idée que l’agrammaticalité possède une séduction, voire une élégance propre24. Ne nous y trompons pas cependant. Certes, en dénonçant la « puerile servitude où quelques Grammairiens veulent nous assujettir pour l’emploi, & pour l’arrangement des termes », Grimarest s’inscrit dans le sillage des résistances à l’entreprise de standardisation des usages initiée par Vaugelas25. Pourtant, s’il incite à la rébellion contre la normativité tyrannique des Remarqueurs, c’est assurément moins pour défendre une position idéologique que pour engager l’usager du traité à adapter son élocution aux goûts stylistiques du moment, l’aisance, la simplicité et la négligence étant jugées plus séduisantes qu’une justesse vétilleuse26. Motivée non par des postulats esthétiques mais par des paramètres d’ordre strictement pragmatique (les « expressions cavalieres et figurées […] rendent une Lettre très-agréable »), la prise de position de Grimarest constitue un bon témoignage de la place prépondérante qu’il accorde aux résultats des procédés qu’il examine.
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27 Comme le montre É. Tourrette dans ce volume, c’est essentiellement à propo...
12De même, au moment où il aborde la question des répétitions (question intensément débattue par les remarqueurs)27, Grimarest en élude consciencieusement les enjeux esthétiques, donnant la primauté aux effets produits à la réception de la lettre.
28 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 31-32.
Les répétitions font un mauvais effet dans le stile épistolaire. C’est un abus de croire que dans un si petit ouvrage il faille avoir recours à cette figure pour toucher, ou pour se faire entendre, ou enfin pour faire valoir une pensée, en faveur de laquelle on est prévenu. On fatigue le Lecteur ; c’est-là tout le fruit que l’on remporte de cette multiplicité d’expressions. Ce défaut est ordinaire aux gens d’étude, parce que s’imaginant presque toûjours mieux penser que les autres hommes, ils veulent tirer avantage de tout ce qu’ils avancent. Les gens du monde au contraire, accoutumés à tout, ne sont point touchés des choses communes, ils les passent légerement, & ils n’emploient de termes précisément que ce qu’il leur en faut pour dire une seue fois les autres.28
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29 Si P. Costar défend ce que certains perçoivent comme des « repetitions tro...
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30 Les « scrupules sur la répétition des mots, ou pour mieux dire sur la renc...
Par rapport aux discussions antérieures sur le sujet, le changement de perspective est radical. Jusque-là en effet, les jugements portés sur les répétitions relevaient d’une appréciation purement esthétique, qu’il s’agisse d’ailleurs de les défendre29 ou de les condamner30. Raisonnant non pas en termes de conformité à des idéaux stylistiques (variété, exactitude), mais de compétences techniques garantissant l’amélioration des performances épistolaires des usagers du manuel, c’est-à-dire l’augmentation des chances de réussite de leurs lettres, Grimarest se contente de mettre en garde, de manière lapidaire, contre les conséquences néfastes induites par ce genre de maladresse. Ainsi l’observation empirique de l’effet produit sur l’interlocuteur par les répétitions injustifiées relègue-t-elle au second plan l’intention normative. Si les épistoliers doivent absolument se départir de ce vice d’élocution, c’est tout simplement parce qu’il « fatigue le Lecteur ». Admirons au passage la progression toute pédagogique du paragraphe. D’abord, anticipant sur les objections possibles, Grimarest balaye les trois arguments utilisés par les traités de rhétorique au moment où ils définissent la « figure » de la répétition. Ensuite, en une phrase aussi brève que percutante, il explique pourquoi « les répétitions font un mauvais effet dans le stile épistolaire » en se plaçant explicitement du côté de la réception (les principes guidant la production comptant moins à ses yeux que le résultat obtenu). Enfin, l’efficience de la proscription se trouve accrue par la sollicitation de deux figures archétypiques utilisées de longue date par les théoriciens de l’honnêteté – celle, négative, des « gens d’étude » et celle, positive, des « gens du monde ».
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31 Sur les prises de position de Vaugelas, de Bouhours et d’Andry de Boisrega...
13L’hostilité de Grimarest à l’égard d’une approche esthétique des infractions stylistiques se vérifie dans le traitement qu’il réserve aux phénomènes de synonymie, qui ont fait l’objet de nombreux commentaires chez les remarqueurs31.
32 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 21-22.
On croit toujours n’en avoir jamais assez dit pour se faire entendre, & l’on accable un Lecteur de pléonasmes ennuïans, qui n’ont aucune grace dans notre Langue. Ainsi on ne doit point accumuler les termes & les expressions synonimes ; mais il faut choisir celles qui sont les plus propres pour exprimer une seule fois la pensée. C’est même une impolitesse de tomber dans le défaut que je reprens, puisque c’est douter de l’intelligence de la personne à qui l’on écrit ; c’est lui donner sans nécessité un long ouvrage à lire. D’ailleurs, je l’ai déjà dit, le stile diffus est encore plus insupportable dans une Lettre, que dans un autre travail.32
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33 Cl. Buridant, « Les binômes synonymiques. Esquisse d’une histoire des coup...
Alors que les débats du Grand Siècle cristallisaient toutes sortes de spéculations foncièrement normatives autour de catégories esthétiques aussi chargées de présupposés idéologiques que celles de clarté, de justesse et d’exactitude, Grimarest privilégie exclusivement des considérations d’ordre pragmatique. S’il cherche à convaincre son lecteur d’expurger ses lettres des « pléonasmes ennuïans » et de ne « point accumuler les termes & les expressions synonimes », ce n’est pas en vue d’asseoir, dans une logique toute doctrinale, les idéaux stylistiques bafoués par de tels procédés. C’est pour aider ses lecteurs à éliminer de leurs lettres un vice de style rédhibitoire, tant il s’avère source de désagréments pour le destinataire, qui, d’une part, a l’impression que son « intelligence » est mise en doute (« impolitesse » suprême) et qui, d’autre part, perd son temps à lire « un long ouvrage » dont l’ampleur est d’autant plus « insupportable » qu’elle n’est pas justifiée. Une fois encore, l’accent n’est pas mis sur la production, mais sur la réception du texte épistolaire. Pour Grimarest, il n’est pas question de procéder à l’exposé dogmatique de principes esthétiques, à l’instar des théoriciens qui, tout au long du XVIIe siècle, ont à cœur de condamner une « rhétorique de la redondance » jugée aussi inélégante que surannée33. Dans la mesure où il s’agit de faire acquérir aux lecteurs du traité une politesse langagière visant à assurer l’efficacité maximale de leurs lettres, « les termes & les expressions synonimes » sont envisagés sous l’angle de leurs résultats pratiques, l’effet négatif produit sur le destinataire étant le seul et unique critère retenu pour juger de leur caractère défectueux. La mise en garde contre les effets indésirables des redondances est d’ailleurs d’autant plus convaincante qu’elle est issue d’une expérience dans laquelle chacun peut se reconnaître. Résultant d’une déduction fondée sur l’observation de répercussions intersubjectives (le sentiment d’être considéré comme peu sagace et l’ennui engendré par un style inutilement « diffus » mettant à mal l’harmonie relationnelle des correspondants), la consigne de ne « point accumuler les termes & les expressions synonimes » illustre ainsi non seulement la prééminence accordée par Grimarest à une perspective pragmatique sur une approche esthétique, mais encore l’origine fondamentalement empirique de la condamnation des infractions stylistiques.
Conclusion
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34 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 7.
14En consacrant dès le début de son ouvrage un développement autonome à l’inventaire informel des infractions susceptibles de compromettre le succès de la communication par lettre au lieu de reconduire, à l’instar de bon nombre de secrétaires, l’analyse systématique des qualités de style constitutives du bon goût épistolaire, Grimarest met au point un dispositif pédagogique original, qui résulte de la volonté revendiquée d’« essaïer de faire plus que ce qui a été fait34 » en matière épistolographique. Loin de ne constituer qu’un procédé didactique parmi d’autres, l’examen des principaux défauts de style nuisibles à l’art de converser par lettre découle de la volonté assumée de Grimarest d’être plus utile au lecteur désireux de « faire une bonne Lettre » que tous les manuels existants. Convaincu que les partis-pris de ses prédécesseurs sont profondément inadaptés, au point d’affirmer que « » nous n’avons aucun Livre qui nous conduise surement » et que « nous n’avons aucuns préceptes à suivre, aucuns modeles pour nous former dans le commerce épistolaire », Grimarest n’hésite pas à démontrer l’inefficacité des différents types d’ouvrages qui prétendent aider à « faire une bonne Lettre ». D’une part, il vitupère ceux dont les prescriptions pèchent par trop d’abstraction théorique (« les préceptes qu’on nous a donnés sur cette matiere, sont ou mal entendus, ou pauvres, &, si j’ose le dire, ridicules »). D’autre part, il soutient que « les Lettres imprimées ne sont pas de plus heureux modeles pour nous former dans le genre épistolaire », fustigeant aussi bien les « Auteurs qui ont publié des Lettres à dessein » que ceux « qui, pour nous assujettir aux regles qu’ils ont voulu nous imposer, y ont ajoûté des modeles » ou encore que les « Recueils des Lettres » publiés « après la mort de quelques personnes illustres ». Au fil de ce panorama critique se dessine ainsi la nécessité flagrante d’inventer un protocole pédagogique innovant, qui, en complémentarité avec d’autres plus traditionnels, soit réellement apte à favoriser l’acquisition de « quelques principes assurés pour se conduire avec plus de sureté dans ce genre de travail ». Dans ce contexte, le choix de procéder, dans les premières pages de l’ouvrage, à la recension des principaux défauts de style épistolaire apparaît comme une option méthodologique mûrement réfléchie, destinée à relever simultanément un triple défi.
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35 Grimarest souligne à plusieurs reprises l’incidence qu’a sur la réputation...
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36 C’est par ces formules que Grimarest annonce et justifie le plan de son ou...
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37 Ibid., p. 11, 13 et 16.
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38 Ibid., p. 1.
15Le premier est évidemment d’ordre technique, puisqu’il s’agit d’améliorer la qualité de l’élocution épistolaire des usagers du manuel, c’est-à-dire de leur donner les moyens de passer d’une rédaction aussi spontanée que maladroite à un savoir-faire garantissant non seulement la réussite de leurs objectifs communicationnels mais encore leur « réputation35 ». Pour assurer l’apprentissage d’une telle compétence, il ne suffit ni de présenter le « stile que l’on doit employer dans chaque genre de Lettres » (les descriptifs dévolus aux composantes définitoires de chacun d’entre eux constituant le cœur de l’ouvrage) ni de rappeler le « Cérémonial, que l’on ne peut bienséamment se dispenser d’observer » (tâche à laquelle s’attelle toute la seconde partie du manuel)36. Encore faut-il, au préalable, d’une part, avoir fourni au lecteur quelques « principes » et « maximes » destinés à le sensibiliser à « la conséquence de penser sérieusement à cet ouvrage » (exposés dans le bref chapitre liminaire)37, et d’autre part, l’avoir débarrassé une fois pour toutes des fautes d’expression les plus communes. À cet égard, l’inventaire, en début d’ouvrage, des pièges les plus grossiers de l’écriture épistolaire constitue la plus efficace des propédeutiques. L’ordonnancement du Traité de Grimarest se révèle ainsi modelé en profondeur par un souci d’efficacité pédagogique, l’épistolier désireux d’amender son style (et prêt pour cela, comme y insiste Grimarest, à en passer « par l’étude, & par l’exercice38 ») étant invité à progresser par étapes.
16Le second défi est davantage d’ordre intellectuel, Grimarest choisissant non pas de faire preuve d’autorité magistrale en exposant des idéaux stylistiques incontestables, mais d’exploiter les capacités heuristiques de son lecteur : la condamnation de vices de style , en le poussant à s’interroger sur les valeurs qu’elle présuppose, l’oblige à exercer son jugement critique, c’est-à-dire à pratiquer un mode de lecture conçu comme une tâche active, à l’opposé de la réception relativement passive qu’engendre la succession de rubriques rhétoriques attendues. Guidant le lecteur des cas particuliers (les faits d’expression prohibés) à des lois générales (les normes du bien-dire), la convocation d’une série de contre-exemples met en place un régime de lecture fondé sur l’induction – une induction rendue possible par les mécanismes cognitifs engagés par la portée illustrative des phénomènes stylistiques concrets que recense Grimarest. À rebours d’une énonciation surplombante, Grimarest, en pédagogue soucieux d’exercer la faculté de juger de ses lecteurs, exige qu’ils découvrent par eux-mêmes, à partir de défauts d’expression soumis à leur perspicacité, le bien-fondé de règles d’expression communément admises.
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39 Sur les profonds infléchissements que connaissent les formes de la critiqu...
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40 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 5, 7, 28.
17Le troisième défi est d’ordre épistémologique. Nul doute en effet qu’en substituant à l’exposé doctoral des qualités du discours épistolaires l’examen empirique de maladresses non pas rapportées aux composantes doctrinales d’une esthétique mais appréciées en fonction des risques qu’elles font courir au locuteur négligent, le chapitre intitulé « Du stile épistolaire » illustre de manière remarquable le contraste (qui n’a cessé de s’accentuer dans les décennies contemporaines des publications de Grimarest39) entre d’une part, une critique savante désormais passée de mode tant sa rationalité méthodique et sa systématicité conceptuelle sont ressenties comme pédantes, et d’autre part, une critique mondaine, qui, se méfiant des modes d’exposition trop ordonnés, s’ingénie à ne formuler, avec une désinvolture soigneusement cultivée, que des remarques, des observations et des sentiments – termes métalinguistiques en vogue que Grimarest ne se prive pas d’utiliser40.
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41 Ibid., p. 10.
18Au travers des trois bénéfices qui résultent du choix de condamner certaines fautes de style ciblées plutôt que de définir les composantes du bien-dire épistolaire, il apparaît que la dénonciation des infractions stylistiques constitue une authentique stratégie pédagogique, pratiquée en toute conscience de ses outils, de ses enjeux et de ses gains. Qu’une telle stratégie ait pour but non seulement de rectifier les défauts d’expression des usagers du manuel, mais encore de leur fournir des critères de goût, et ainsi d’affiner leur compétence critique, c’est ce que confirme l’avertissement que formule Grimarest à la fin de son préambule. Si l’auteur restreint explicitement son public aux seules « personnes qui ont du goût pour connoître le vrai41 », c’est bien qu’il les invite à perfectionner autant leur art d’écrire que leur art de juger.
Notes
1 Jean-Léonor Le Gallois, sieur de Grimarest, « professeur de langues à Paris », s’était déjà intéressé à l’épistolaire en publiant un Commerce de lettres curieuses et savantes, A. Cramoisy, 1700 (donné comme suite à son Commerce savant et curieux, A. Cramoisy, 1699). Il est l’auteur d’ouvrages critiques variés, qui témoignent successivement de préoccupations d’ordre biographique (La Vie de M. de Molière, Paris, Le Febvre, 1705 et Addition à la Vie de M. de Molière, contenant une réponse à la critique que l’on en a faite, Paris, J. Le Febvre et P. Ribou, 1706); esthétique (Traité du récitatif dans la lecture, dans l’action publique, dans la déclamation & dans le chant, avec un traité des accents, de la quantité & de la ponctuation, Paris, 1707, J. Le Fevre et P. Ribou, 1707) ; rhétorique (Traité sur la manière d’écrire des lettres et sur le cérémonial, Avec un Discours sur ce qu’on appelle Usage dans la Langue Françoise, La Haye, A. Moetjens, 1709) ; grammatical (Élaircissemens sur les principes de la langue française, Paris, Florentin Delaulne, 1712).
2 L’édition du Traité sur la manière d’écrire des lettres et sur le cérémonial que nous citons est celle parue chez la Veuve Estienne en 1735 (la première édition date de 1709). Après un préambule (p. 1-10), la première partie comprend deux chapitres : le premier, qui se réduit à quelques pages, examine les « Sentimens que l’on doit faire paroître dans une Lettre » (p. 11-17) ; le second, très long, s’ouvre sur une réflexion générale intitulée « Du stile épistolaire » (p. 17-33) avant de caractériser une à une les différentes sortes de lettres (lettres familières, lettres galantes, lettres amoureuses, lettres de compliments, lettres d’affaires et épîtres dédicatoires, p. 33-99). La seconde partie, qui commence par une courte réflexion sur le « Cérémonial dans le Commerce des Lettres » (p. 100-104), se compose quant à elle de cinq chapitres (« Des Lettres avec des souscriptions », « Des Lettres en Billets », « Des Lettres en Mémoire », « Remarques sur la politesse que l’on doit observer sur le Commerce des Lettres », « Des Suscriptions », p. 104-187).
3 Parmi les exposés systématiques des vertus stylistiques à respecter en toutes circonstances (chacune d’entre elles donnant rigoureusement lieu à un paragraphe), nous renvoyons à J. Puget de la Serre, qui, dans la seconde partie, intitulée « De la forme des lettres », de son « Instruction à escrire des lettres » examine successivement les exigences canoniques (signalées par les manchettes) de « Brieveté », de « Clarté » et de « Netteté » (Le Secrétaire à la mode, Amsteradm, L. Elzevier, 1646, p. 46-48) ; à Cl. Irson, qui dans le chapitre intitulé « Du stile de la lettre », montre que « le Stile doit estre Succinct, Clair, Facile, Agréable & Accommodé au sujet. » (Méthode pour bien écrire & composer des lettres, que l’on appelle epistres, contenue dans la Nouvelle méthode pour apprendre facilement les principes et la pureté de la langue françoise, Contenant plusieurs traitez…, Paris, G. Meturas, 1656, p. 237-240) ; à Mattéi de La Barre, qui rappelle que « La Lettre doit être simple, claire, courte, agreable » (L’Art d’écrire en François, ou la manière de faire des lettres, « Premier traité », contenu dans L’Art d’écrire en François, ou la manière de faire des complimens, des lettres, des discours en Dialogues, des Traductions, des Harangues, l’Histoire, des Romans, Paris, N. Jolybois, 1662, p. 6-8).
4 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 8.
5 Pour une synthèse sur l’exigence sans cesse croissante de naturel dans la prose épistolaire, voir G. Haroche-Bouzinac, Voltaire dans ses lettres de jeunesse (1711-1733). La formation d’un épistolier au XVIIIe siècle, Paris, Klincksieck, 1992, p. 82-91.
6 Pour un tour d’horizon des termes utilisés par la critique pour dénoncer les infractions commises contre le naturel, la simplicité et la facilité, voir N. Hepp, « Esquisse du vocabulaire de la critique littéraire de la querelle du Cid à la querelle d’Homère », Romanische Forschungen, n° 69, 1957, p. 378-381.
7 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 17-18.
8 Les secrétaires se contentent rarement de faire état des critères de goût en vigueur de manière objective. À la promotion de certaines qualités du style (qui se fait forcément au détriment d’autres, en écho aux débats sur le bel usage qui, d’un bout à l’autre du XVIIe siècle, ne cessent de modifier les axiologies stylistiques existantes), ils allient de virulentes mises en garde contre les manières de s’exprimer dépassées – à preuve ces consignes d’Ortigue de Vaumorière : « Faisons-nous une loi inviolable de consulter le goût du siécle & de la Nation. Si les gens polis ne mettent dans leurs Lettres ni fables, ni histoires, ni proverbes, ni sentances, renonçons à ces prétendus ornemens que l’on cherchait autrefois avec tant de soin : Abandonnons-les à certains beaux Esprits, qui s’érigent en oracles de la basse Bourgeoisie. […]. Ce stile passoit autrefois pour être plein de bon sens et d’érudition, & presentement ce seroit assez que d’écrire de la sorte pour être tourné en ridicule. » (Lettres sur toutes sortes de sujets, Avec des avis sur la manière de les écrire, tome I, Paris, J. Guignard, 1690, chap. IV : « Du stile qui convient aux lettres », p. 32-33).
9 Pour une mise en perspective du rejet progressif d’une rhétorique de plus en plus perçue comme technique pourvoyeuse d’ornements superflus, voir B. Beugnot, « La précellence du style moyen (1625-1650) », et V. Kapp, « L’apogée de l’atticisme français ou l’éloquence qui se moque de la rhétorique », dans M. Fumaroli (dir.), Histoire de la rhétorique dans l’Europe moderne 1450-1950, Paris, PUF, 1999, p. 539-599 et p. 707-786.
10 Nous reprenons ici les termes qu’emploie le chevalier de Méré critiquant la prose de Voiture, Œuvres complètes, tome I : Les Conversations. Discours de la justesse [1668-1669], éd. Ch.-H. Boudhors, Paris, Fernand Roches, coll. « Les textes français », 1930, p. 102, 103 et 108. Sur les arguments utilisés à l’encontre d’un style dénoncé comme précieux, voir D. Denis, « Réflexions sur le “style galant” : une théorisation floue », Littératures classiques, n° 28, 1996, p. 147-158, et « Ce que parler “prétieux” veut dire », L’Information grammaticale, n° 78, juin 1998, p. 53-58.
11 C’est à ces deux épistoliers que Ch. Sorel consacre l’essentiel de la partie intitulée « Des epistres et des lettres » de sa Bibliothèque françoise (Paris, Compagnie des Libraires du Palais, 1667 [Genève, Slatkine Reprints, 1970], p. 106-143). Sur l’évolution du goût épistolaire telle que la reflètent la faveur puis la défaveur des lettres de Guez de Balzac, on se reportera à G. Haroche-Bouzinac, Voltaire dans ses lettres de jeunesse (1711-1733), op. cit., p. 46-49, et à B. Bray, « L’image de Guez de Balzac dans les manuels et recueils épistolaires » [1998], repris dans Épistoliers de l’âge classique, L’art de la correspondance chez Mme de Sévigné et quelques prédécesseurs, contemporains et héritiers, Tübingen, Narr, 2007, p. 187-204.
12 Sur la manière dont Costar cherche « à accréditer dans le public l’image d’un Balzac crispé dans la pratique de l’hyperbole, et donc incapable de s’exercer dans le genre familier », voir R. Zuber, « Atticisme et classicisme », dans Critique et création littéraires en France au XVIIe siècle, Paris, CNRS, 1977, p. 375-393. Sur la façon dont Bouhours dénigre systématiquement le style de Balzac, qu’il juge vieilli, au profit de la manière d’écrire de Voiture, identifiée à l’esthétique galante, faite de naturel et d’agrément, voir G. Declercq, « Bouhours lecteur de Balzac, ou du naturel », Littératures classiques, n° 33, 1998, p. 93-114.
13 Comme le souligne G. Haroche-Bouzinac, « dans cette désaffection progressive des modernes pour le tour d’esprit de Voiture et ses grâces alertes, se dessine une évolution de la notion de naturel », Voltaire dans ses lettres de jeunesse (1711-1733), op. cit., p. 49-52.
14 Parmi les secrétaires défendant la médiocrité en matière de longueur des missives, citons les conseils de J. Puget de la Serre : « En quatrieme lieu, on recommande és lettres la brieveté, qui requiert qu’elles ne soient ni trop longues, ni trop courtes, mais de mediocre grandeur. Or on juge qu’une lettre est de mediocre grandeur, quand elle est proportionnée à la matiere qu’elle traite, qui tantost a besoin d’estre estenduë tanstot d’estre resserreé. » (Le Secrétaire à la mode, op. cit., p. 46-47).
15 L’articulation de la réponse avec le propos antérieur constituant un passage obligé de toute correspondance particulièrement périlleux, les secrétaires ne manquent pas de se pencher sur les modalités de reprise (plus ou moins condensée, plus ou moins reformulée) du discours de l’autre. Citons par exemple la recommandation de Cl. Irson : « Il ne faut pas répeter les choses ausquelles on répond, à moins que l’on ne s’y voye obligé par une grande necessité ; & encore il le faut faire tres-succinctement. » (Méthode pour bien écrire & composer des lettres, que l’on appelle epistres, op. cit., p. 238). Cette recommandation intervient au sein des prescriptions concernant le caractère nécessairement « succinct » du style épistolaire.
16 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 27-28.
17 En plaidant pour un agencement des parties libre et spontané, Grimarest ne fait qu’entériner la désaffection pour un procédé dont le formalisme apparaît inconciliable avec un style aisé, vif et rapide. C’est ce que montrent les conseils de Mattéi de La Barre (fondés sur la dichotomie fond/forme), qui, dans le développement qu’il consacre à « l’ordre des parties de la Lettre », insiste sur le fait que c’est le contenu de la lettre qui lui donne cohérence et continuité, chaque sujet amenant naturellement le suivant, et non des formules de transition convenues : « [Les propositions] doivent avoir un rapport entr’elles, qui les attache comme d’elles-mesmes ; & la parfaite dépendance les unes des autres, n’a presque pas besoin de conjonctions pour les tenir ensemble : car toutes les choses semblables, semblent avoir quelque attachement l’une à l’autre de leur nature. Cette union naturelle est beaucoup plus forte & plus agreable, que celle que l’artifice s’efforce de faire, par le moyen des conjonctions, qui font un passage de l’une à l’autre, beaucoup plus rude & plus desagreable. » (L’Art d’écrire en François, ou la manière de faire des lettres, « Second traité : De la lettre en particulier », contenu dans L’Art d’écrire en François, op. cit., p. 7).
18 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 28-29.
19 Une telle défiance à l’encontre des transitions fait écho à l’abandon des principes concernant la disposition épistolaire : au cours du XVIIe siècle, les secrétaires qui, reprenant à leur compte les conceptions du siècle précédent, prônent encore une composition rhétorique rigoureuse, se font de plus en plus rares. Pour une réflexion sur l’évolution des critères d’appréciation concernant les formes d’organisation interne de la lettre, voir G. Haroche-Bouzinac, Voltaire dans ses lettres de jeunesse (1711-1733), op. cit., p. 61-65.
20 Sur l’imaginaire linguistique sous-jacent à ces catégories, voir D. Denis, « La douceur, une catégorie critique au XVIIe siècle », dans M.-H. Prat et P. Servet (dir.), Le doux aux XVIe et XVIIe siècles. Écriture, esthétique, politique, spiritualité, Université Jean Moulin-Lyon 3, 2003, p. 239-260, et G. Siouffi, Le Génie de la langue française. Études sur les structures imaginaires de la description linguistique à l’Âge classique, Paris, Champion, 2010, p. 149-152.
21 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 24-25.
22 Sur ces distinctions de Bouhours, voir G. Declercq, « Usage et Bel Usage : l’éloge de la langue dans les Entretiens d’Ariste et d’Eugène du père Bouhours », Littératures classiques, n° 28, « Le style au XVIIe siècle », G. Molinié (dir.), p. 126-130.
23 Après qu’Eugène a souligné que « la langue Française aime fort la naïveté », que « tout ce qui a l’air de contrainte la choque », qu’elle « n’affecte jamais rien » et qu’elle « souffrirait plutôt des barbarismes que des afféteries », Ariste conclut que « pour parler bien Français, il ne faut point vouloir trop bien parler », D. Bouhours, Les Entretiens d’Ariste et d’Eugène [1671], éd. B. Beugnot et G. Declercq, Paris, Champion, 2003, p. 116.
24 G. Siouffi, Le Génie de la langue française, op. cit., 2ème partie, chap. III : « Agrammaticalité et élégance », p. 421-452.
25 Sur la puissance d’un courant anti-puriste aussi vivace que protéiforme tout au long du XVIIe siècle, voir G. Siouffi, « De la Renaissance à la Révolution », dans A. Rey, Fr. Duval et G. Siouffi, Mille ans de langue française. Histoire d’une passion, Paris, Perrin, 2007, p. 684-706.
26 Sur ces qualités stylistiques unanimement prônées par les secrétaires de l’âge classique, voir G. Haroche-Bouzinac, Voltaire dans ses lettres de jeunesse (1711-1733), op. cit., p. 79-82. Pour une mise en contexte de la réhabilitation des irrégularités, qui est le corollaire de la suprématie du jugement de goût sur le fétichisme des règles, voir Cl. Chantalat, À la recherche du goût classique, Paris, Klincksieck, 1992, p. 144-149, et V. Kapp, « L’apogée de l’atticisme français ou l’éloquence qui se moque de la rhétorique », op. cit., p. 733-736.
27 Comme le montre É. Tourrette dans ce volume, c’est essentiellement à propos des divers phénomènes de répétition que les remarqueurs (Vaugelas, Bouhours, Bellegarde) parlent de négligences (« Qu’est-ce qu’une négligence de style au XVIIe siècle »).
28 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 31-32.
29 Si P. Costar défend ce que certains perçoivent comme des « repetitions trop frequentes » dans les lettres de Voiture, c’est qu’il estime qu’elles constituent « une marque d’abondance plustot que de pauvreté » (Suite de la défense des œuvres de M. de Voiture, à M. Ménage, Paris, A. Courbé, 1655, p. 401-408).
30 Les « scrupules sur la répétition des mots, ou pour mieux dire sur la rencontre des mesmes paroles dans une mesme période » qu’expose Bouhours procèdent d’une volonté de lutter contre tout ce qui altère « la politesse et la perfection du stile » (Doutes sur la langue françoise proposez à Messieurs de l’Académie Françoise par un gentilhomme de province, Paris, S. Mabre-Cramoisy, 1674, p. 230-255). Commentant de nombreux exemples de répétitions, Bouhours montre que « ces petites négligences […] sont opposées à l’exactitude, […] qui demande qu’on évite tout ce qui blesse les oreilles délicates, & qu’on ne dise rien mesme qui se fasse trop remarquer » (ibid., p. 250), avant de souligner « qu’un peu de variété contribuë beaucoup à la justesse & à l’élégance ; & qu’au contraire, il ne faut quelquefois qu’un petit mot répeté, pour oster toute la grace à une belle période. » (ibid., p. 254).
31 Sur les prises de position de Vaugelas, de Bouhours et d’Andry de Boisregard, voir G. Siouffi, « Du syntagme au paradigme : autour de la synonymie chez D. Bouhours », Cahiers de Lexicologie, n° 92, 2008-1, p. 31-50.
32 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 21-22.
33 Cl. Buridant, « Les binômes synonymiques. Esquisse d’une histoire des couples de synonymes du Moyen-Âge au XVIIe siècle », Bulletin du Centre d’Analyse du Discours, n° 4, « Synonymies », Presses Universitaires de Lille, 1980, p. 41-52.
34 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 7.
35 Grimarest souligne à plusieurs reprises l’incidence qu’a sur la réputation de l’épistolier le style de ses lettres : « Comme on juge plus surement du caractere d’une personne par ses Lettres, que par sa conversation, […] il est de consequence d’y ménager sa reputation avec soin. », ibid., p. 13.
36 C’est par ces formules que Grimarest annonce et justifie le plan de son ouvrage, ibid., p. 9.
37 Ibid., p. 11, 13 et 16.
38 Ibid., p. 1.
39 Sur les profonds infléchissements que connaissent les formes de la critique, voir J.-P. Sermain, « Les avatars de l’art de bien dire au tournant du XVIIe siècle (1685-1720) », dans G. Berger (dir.), Zur Geschichte von Buch und Leser im Frankreich des Ancien Régime. Beiträge zu einer empirischen Rezeptionsforschung, Rheinfelden-Berlin, Schäuble, 1993, p. 145-162. Pour une une mise en regard des différentes formes de la critique, signalons également J.-P. Dens, « Pour une théorie de la critique mondaine », P.F.S.C.L., vol. XIII, n° 24, 1986, p. 29-37.
40 Traité sur la manière d’écrire des lettres, op. cit., p. 5, 7, 28.
41 Ibid., p. 10.
Pour citer ce document
Quelques mots à propos de : Cécile Lignereux
RARE Rhétorique de l’antiquité à la Révolution / UMR 5316 Litt&Arts (CNRS/UGA)